CHAPITRE XVII

Victoire finale

 

 

LES trois hommes demeurèrent sur la grève, regardant Claude s’éloigner à grands coups d’avirons. Ils ne pouvaient rien faire d’autre. Leur canot était complètement hors d’usage.

Quand les enfants furent sortis du petit havre et eurent contourné les rochers qui en défendaient l’accès, Claude désigna du menton un bateau de pêche à l’ancre non loin de là.

« Regardez, dit-elle sans cesser de tirer sur les rames. Voilà le bateau que les malfaiteurs ont fait venir ici pour enlever le trésor. Il est trop gros pour pouvoir entrer dans la crique. Pour que les bandits puissent quitter l’île il faudrait qu’un complice vienne les chercher avec une toute petite embarcation. »

Comme les enfants passaient à proximité de la grosse barque de pêche, un marin, qui semblait seul à bord, les héla.

« Ohé ! Là-bas ! Venez-vous de l’île de Kernach ?

— Ne répondez pas ! ordonna Claude. Ne dites pas un mot. »

Obéissants, les trois autres se turent et Claude en fit autant. On aurait pu croire qu’ils n’avaient rien entendu…

« Ohé ! Là-bas ! cria le marin d’une voix coléreuse. Êtes-vous sourds ? Je vous demande si vous venez de l’île. »

Les enfants continuèrent à ne pas répondre. Leur regard était tourné dans une autre direction que celle du bateau de pêche. Ils ne semblaient même pas l’avoir aperçu. Claude ramait toujours vigoureusement.

Le marin renonça à les appeler. Fronçant les sourcils, il considéra l’île d’un air perplexe. Quelque chose le tracassait soudain. Il était presque sûr que les enfants venaient de l’île et, comme il soupçonnait que ses employeurs avaient là-bas quelque louche besogne en train, il se demandait si cette bande de gosses ne leur avait pas joué un mauvais tour. Peut-être ferait-il bien d’aller voir ce qui se passait à terre ? Après tout, on lui avait promis une grosse somme d’argent et il entendait bien la toucher.

Claude devina en partie ses pensées.

« Quand il s’apercevra que les autres ne reviennent pas à bord, dit-elle, il est bien possible qu’il mette sa petite chaloupe à l’eau et aille voir lui-même de quoi il retourne. Nous ne pouvons malheureusement empêcher cela. Toutefois je ne crois pas que ces gredins oseront emporter l’or à présent que nous sommes libres et que nous allons raconter notre histoire à papa.

— Et puis, suggéra Mick plein d’espoir, peut-être que ce marin n’ira au secours des autres que beaucoup plus tard,… alors que la police sera déjà alertée.

— Je l’espère ! dit Claude. Je rame aussi vite que je peux. »

Bientôt le canot des enfants toucha terre. Les quatre compagnons sautèrent parmi les vaguelettes qui venaient lécher le rivage et se dépêchèrent de tirer leur embarcation sur le sable. Dagobert lui aussi tirait sur l’aussière qu’il avait saisie entre ses crocs. Ce faisant, il remuait la queue d’un air joyeux. Le brave animal adorait participer à tout ce que faisaient ses jeunes maîtres.

« Vas-tu ramener Dagobert à Jean-Jacques ? » demanda Mick à sa cousine.

Claude secoua la tête.

« Non, répondit-elle. Nous n’avons pas le temps. Il faut nous hâter de rentrer et de raconter ce qui s’est passé sur l’île. Je me contenterai d’attacher Dago à la barrière du jardin, près du portail. »

Les enfants regagnèrent la Villa des Mouettes à une allure accélérée. Ils trouvèrent tante Cécile dehors, en train de jardiner. La jeune femme considéra d’un air étonné les enfants en nage.

« Vous voici déjà de retour ! s’écria-t-elle. Je ne comptais pas sur vous avant demain ou même après-demain ! Est-il arrivé quelque chose ? Oh ! mon Dieu… Mick ! Tu t’es blessé à la joue !

— Ce n’est rien », assura Mick.

Les autres se mirent à parler tous à la fois.

« Tante Cécile ! Où donc est oncle Henri ? Nous avons quelque chose d’important à lui dire.

— Maman, si tu savais l’aventure que nous venons de vivre !

— Tante Cécile, vous ne croiriez jamais ce qui nous est arrivé…»

Mme Dorsel, de plus en plus stupéfaite, remarqua alors les vêtements salis et déchirés de sa fille et de ses neveux.

« Que s’est-il donc passé ? » demanda-t-elle. Puis, se tournant vers la maison, elle appela : « Henri ! Henri ! Les enfants ont quelque chose à te dire ! »

M.Dorsel fit son apparition, l’air maussade, car on le dérangeait en plein travail.

 

« De quoi s’agit-il ? demanda-t-il d’un ton brusque.

— Oncle Henri, c’est à propos de l’île de Kernach, expliqua François fébrilement. Cet homme qui désirait l’acheter n’en est pas encore propriétaire, n’est-ce pas ?

— Ma foi, l’île est pour ainsi dire vendue, répondit son oncle. J’ai signé l’acte de mon côté et ce M. Gustave je-ne-sais-plus-qui doit le signer demain pour sa part. Mais pourquoi me demandes-tu ça ? En quoi cette histoire t’intéresse-t-elle ?

— Mon oncle, cet homme ne signera rien du tout demain. Savez-vous pourquoi il voulait acheter l’île et le château ? Non pas pour y faire construire un hôtel comme il essayait de vous le faire croire, mais parce qu’il savait que l’or se trouvait caché là-bas.

— Ah ça, mon garçon, quelles sottises me débites-tu ? s’écria M. Dorsel.

— Ce ne sont pas des sottises, papa ! protesta Claude avec indignation. C’est la pure vérité. Le plan du vieux château se trouvait dans le coffret d’étain que tu as vendu à ce malhonnête antiquaire… et le plan indiquait l’endroit où mon arrière-arrière-grand-père avait enfoui les lingots d’or.

Le père de Claude eut l’air d’abord surpris, puis ennuyé. En fait, il ne croyait pas un mot de ce qu’il entendait. Tante Cécile, en revanche, n’eut qu’à regarder le visage grave et tendu des quatre enfants pour comprendre qu’un fait sérieux s’était produit.

Et soudain, dans le silence qui venait de tomber, Annie éclata en sanglots bruyants. Elle avait subi trop d’émotions et la pensée que son oncle refusait de croire leur histoire pourtant si véridique était plus qu’elle ne pouvait en supporter.

« Tante Cécile ! Nous vous disons la vérité ! hoqueta-t-elle. Oncle Henri a tort de ne pas nous croire ! Oh ! Tante Cécile, l’homme avait un pistolet… et il a enfermé Claude et François dans les oubliettes… et Mick a été obligé de descendre dans le puits pour les délivrer. Et ensuite Claude a démoli le moteur de leur canot à coups de hache pour les empêcher de nous poursuivre ! »

Il était difficile à M. et Mme Dorsel de suivre le fil exact de l’histoire à travers le discours plutôt incohérent d’Annie, mais l’oncle Henri parut enfin comprendre que les événements qui venaient de se dérouler dans l’île de Kernach étaient graves et valaient la peine qu’on leur prêtât attention.

« Claude a abîmé un canot à moteur ! s’exclama-t-il. Quelle action insensée ! Allons, suivez-moi dans mon bureau. Vous allez me raconter toute cette histoire d’un bout à l’autre, posément, sans négliger aucun détail. Jusqu’ici, je n’y comprends pas grand-chose ! »

Tout le monde rentra à la villa. Annie s’installa sur les genoux de sa tante et écouta Claude et François faire le récit de leurs aventures. Ils parlèrent d’une façon précise et sans rien laisser dans l’ombre. En apprenant ce qui leur était arrivé, tante Cécile devint toute pâle, surtout lorsqu’il fut question de l’exploit de Mick se risquant au fond du puits.

« Oh ! Mick ! s’écria-t-elle. Tu aurais pu te tuer ! Quel courageux garçon tu fais ! »

M. Dorsel, pour sa part, écoutait sans rien dire. Il était stupéfait, au-delà de toutes limites. Il n’avait jamais été beaucoup attiré par les enfants et ne leur trouvait pas grand intérêt en général. Mais aujourd’hui, à l’audition du récit de François, son opinion changeait du tout au tout.

Ces quatre intrépides forçaient son admiration.

« Vous avez fait preuve de beaucoup d’habileté, dit-il enfin, et aussi de courage. Je suis fier de vous. Oui, en vérité, je suis très fier de vous tous. Je comprends à présent pourquoi tu insistais si fort pour que je ne vende pas l’île, Claude ! Tu savais que les lingots d’or étaient cachés là-bas. Mais pourquoi ne me l’as-tu pas dit ? »

Les quatre enfants le regardèrent sans répondre. Ils n’osaient révéler le fond de leur pensée et dire tout haut la vérité, à savoir qu’ils auraient craint que leur oncle ne les crût pas, et ensuite qu’ils avaient toujours un peu peur de lui.

« Pourquoi ne répondez-vous pas ? » insista M. Dorsel.

Ce fut sa femme qui s’en chargea. Elle le fit d’une voix douce.

« Henri, dit-elle, je pense que tu intimides les enfants, ne crois-tu pas ? C’est pour cela qu’ils ne se confient pas volontiers à toi. Mais à présent qu’ils s’y sont décidés, te voici en mesure de prendre l’affaire en main. Claude et ses cousins ne peuvent continuer à lutter seuls contre ces hommes. Tu dois prévenir la police et c’est à elle d’intervenir au plus vite. Il n’y a pas de temps à perdre !

— Très bien ! » dit l’oncle Henri en se levant d’un bond. Il donna une tape amicale sur le dos de François. « Jeune homme, lui dit-il, tu as bien travaillé…»

 

Puis il ébouriffa les cheveux courts et bouclés de Claude. « Et je suis fier de toi, Claude ! ajouta-t-il. Oui, je suis fier de toi, mon garçon !

— Oh ! Papa ! » s’exclama Claude qui se mit à rougir de surprise et de joie.

Elle sourit à son père qui lui rendit son sourire. Leurs visages en furent illuminés et tout transformés. Comme cet air aimable leur seyait bien, à l’un et à l’autre ! L’oncle Henri et Claude se ressemblaient décidément beaucoup. Tous deux étaient peu agréables à regarder quand ils arboraient une mine renfrognée, mais c’était tout le contraire quand ils riaient ou souriaient.

Sans plus s’attarder, M. Dorsel alla téléphoner à la gendarmerie, puis à son homme d’affaires.

Pendant ce temps, tante Cécile servit une collation aux enfants. Tout en dévorant des biscuits et des prunes, ceux-ci contèrent à leur tante de menus détails qu’ils avaient négligés au cours de leur précédent récit.

Et soudain, alors qu’ils étaient encore à table, un terrible aboiement de colère leur parvint du fond du jardin. Claude se leva d’un bond.

« C’est Dagobert, expliqua-t-elle à sa mère avec une lueur inquiète au fond des yeux. Je n’ai pas eu le temps de le ramener à Jean-Jacques qui le garde ordinairement pour moi. Si tu savais, maman, comme Dagobert nous a été utile sur l’île ! Je te prie de l’excuser d’avoir aboyé ainsi à l’instant même… mais je crois que le pauvre a faim.

— Eh bien, va le chercher ! dit Mme Dorsel d’une manière tout à fait inattendue. Ce chien est lui aussi un héros à sa manière… il a droit à un bon dîner. »

Claude sourit, enchantée. Elle sortit en courant et alla rejoindre Dagobert. Elle le détacha et revint avec lui. Le chien entra en bondissant, tout en agitant sa longue queue. Il donna un grand coup de langue sur la main de tante Cécile et dressa comiquement les oreilles en la regardant.

« Brave toutou ! dit la mère de Claude en le caressant. Attends, je vais te préparer quelque chose de bon ! »

Dagobert comprit et la suivit à la cuisine. François sourit à Claude.

« Eh bien, murmura-t-il, tu as vu ? Ta mère est épatante, tu sais !

— Oui… mais je ne sais pas ce que papa va dire en voyant Dagobert de nouveau dans la maison ! » répondit Claude d’un ton soucieux.

M. Dorsel revint l’instant d’après, le visage grave.

« La police s’intéresse vivement à cette histoire, expliqua-t-il, et mon homme d’affaires également. Tout le monde est d’accord pour reconnaître que vous, les enfants, vous vous êtes montrés très malins et très courageux. Et puis, Claude,… mon avocat affirme que ces lingots d’or sont notre propriété, sans contestation possible… Y en a-t-il vraiment beaucoup, dis-moi ?

— Des centaines, papa ! s’écria Claude. Des centaines, sans exagérer ! Ils forment un tas énorme au fond du cachot où nous étions enfermés. Allons-nous être très riches à présent ?

— Oui, répondit son père. Sans aucun doute. Assez riches pour que je puisse enfin vous offrir, à ta maman et à toi, toutes les choses dont je rêvais de vous combler depuis tant d’années sans pouvoir jamais y arriver ! J’ai travaillé sans relâche pour vous deux, mais mon travail n’est pas de l’espèce qui rapporte une fortune. C’est pour cela que j’étais si souvent irritable et de mauvaise humeur. Mais à présent vous aurez tout ce que vous désirez !

— Je ne désire rien de plus que ce que j’ai ! répondit Claude. Et pourtant, papa, il y a une chose que je souhaite plus que tout au monde, et que tu pourrais m’accorder… sans qu’il t’en coûte un sou !

— Entendu ! » dit M. Dorsel en passant son bras autour des épaules de Claude. Ce geste plein d’affection surprit agréablement la fillette. « Entendu, répéta-t-il. Dis-moi de quoi il s’agit et même si cela coûte très cher, sois sûre que tu l’auras ! »

À cet instant précis on entendit le bruit de grosses pattes le long du corridor conduisant à la salle à manger où les enfants et M. Dorsel se trouvaient réunis. Une tête aux poils embroussaillés passa par l’entrebâillement de la porte et une paire d’yeux vifs dévisagea chacun des occupants de la pièce. C’était Dagobert !

L’oncle Henri le regarda, stupéfait.

« Mais… n’est-ce pas là Dagobert ?… Salut, Dago !

— Papa ! Dagobert est ce que je désire le plus au monde, expliqua Claude en pressant le bras de son père. Tu ne peux savoir quel réconfort il a été pour nous lorsque nous nous trouvions en danger sur l’île. Il voulait sauter à la gorge de ces gredins et nous défendre. Je ne veux aucun autre cadeau, papa… Je souhaite seulement pouvoir garder Dagobert auprès de moi et profiter enfin de sa compagnie. Nous pourrions le loger dans une jolie niche, au jardin, et je veillerais à ce qu’il ne te dérange pas, je te le promets !

— Eh bien ! garde Dagobert, si tu veux ! » déclara l’oncle Henri.

Tout aussitôt, comme s’il eût compris ce que M. Dorsel venait de dire, Dagobert entra carrément dans la pièce, agitant la queue avec frénésie. Il alla droit au père de Claude et lui lécha la main. Annie songea à part elle que c’était là une grande preuve de courage.

Il est vrai que l’oncle Henri n’était plus le même désormais. On aurait dit qu’un grand poids venait soudain de quitter ses épaules. C’est que la famille Dorsel était riche à présent. Claude pourrait aller dans une bonne pension et tante Cécile serait en mesure d’acheter toutes les choses dont elle aurait envie. De plus, l’oncle Henri pourrait de son côté continuer à faire le travail qui lui plaisait, mais sans avoir le souci d’en retirer assez d’argent pour faire vivre les siens. Conscient du changement que la découverte du trésor apportait dans leur existence, il rayonnait de joie et ne ressemblait plus au savant maussade que les enfants connaissaient.

Claude, elle aussi, était radieuse. Dagobert lui appartenait ! Dans sa joie, elle se jeta au cou de son père et l’embrassa avec effusion, ce qu’elle n’avait pas fait depuis longtemps M. Dorsel parut à la fois surpris et charmé.

« Eh bien, eh bien, dit-il. Tout le monde est content, à ce qu’il semble…» Il s’interrompit soudain au bruit d’une voiture qui s’arrêtait devant la porte. « Tiens, fit-il remarquer, serait-ce déjà la police ? »

C’était bien elle. Les gendarmes entrèrent et échangèrent quelques mots avec M. Dorsel. Puis l’un d’eux resta sur place pour prendre par écrit la déposition des enfants, tandis que les autres se hâtaient de partir en bateau pour l’île de Kernach…

Ils y arrivèrent juste à temps ! Le patron du bateau de pêche s’était finalement décidé à aller voir pourquoi ses passagers tardaient tant à revenir. Comme il était seul à bord, il lui avait fallu longtemps pour mettre la chaloupe à l’eau. Les gendarmes survinrent au moment précis où il ramenait les trois gredins à bord après les avoir embarqués sur la plage. L’arrestation des voleurs se fit sans difficulté. Outre le témoignage des enfants, il y avait une autre preuve contre eux : ils avaient eu l’audace de prendre quelques lingots avant de fuir. Ce fut ce retard qui causa leur perte définitive. Ils devaient par la suite méditer en prison sur les tristes conséquences de leur malhonnêteté.

Les gendarmes allèrent jeter un coup d’œil au canot à moteur endommagé par Claude.

« Ma foi, dit l’un d’eux en souriant, cette petite Claudine Dorsel n’a pas froid aux yeux. Elle a fait là du bon travail ! C’est grâce à elle que les bandits sont restés impuissants sur l’île. Nous allons remorquer ce bateau jusqu’au port…»

Avant de quitter l’île, les gendarmes descendirent dans les souterrains pour poser les scellés sur la porte de la cave aux lingots. Ainsi personne ne pourrait pénétrer dans cette pièce et l’or demeurerait à l’abri jusqu’à ce que M. Dorsel vienne le chercher. En attendant, le père de Claude aurait la joie d’examiner de près un échantillon de sa fortune : les gendarmes lui rapportaient les quelques lingots trouvés sur les voleurs…

En apprenant que les trois malfaiteurs avaient été capturés, les enfants se réjouirent tout haut : le trésor était sauf et les coupables seraient punis de leur malhonnêteté ! Une seule chose les déçut un peu : ils s’étaient imaginé que les gendarmes rapporteraient avec eux la totalité des lingots.

Claude et ses cousins se sentaient à présent très fatigués. Aussi, ce soir-là, ne protestèrent-ils pas lorsque tante Cécile décida qu’ils iraient se coucher de bonne heure.

« Je vais vous faire dîner avant oncle Henri et moi, déclara-t-elle, après quoi vous monterez tout droit au lit. Une bonne nuit dissipera la fatigue de la journée. »

Les enfants se réunirent donc dans la salle à manger. Dagobert demeura avec eux prêt à ramasser les miettes qu’on voudrait bien lui abandonner.

« Eh bien, dit soudain François en réprimant un bâillement, il faut reconnaître que nous avons vécu une aventure sensationnelle. Je suis presque ennuyé en un sens qu’elle soit déjà finie… Et pourtant, nous avons connu des heures bien angoissantes… surtout quand toi et moi, Claude, nous étions prisonniers dans le souterrain. Quelles émotions ! »

Claude grignotait des biscuits d’un air ravi. Elle sourit à François.

« Dire qu’au début j’étais furieuse que vous soyez venus passer vos vacances ici ! s’écria-t-elle.

J’avais l’intention de vous faire grise mine. Je voulais vous donner l’envie de rentrer chez vous ! Et maintenant je suis triste rien qu’à l’idée que vous partirez à la fin de l’été ! Comme vous allez me manquer ! Après avoir eu trois amis pour partager avec moi de palpitantes aventures, je vais me retrouver toute seule. Je n’avais jamais éprouvé le besoin d’une compagnie auparavant. Mais à présent…»

 

Tante Cécile parut sur le seuil de la salle à manger.

« Allons, mes enfants, il est temps de monter vous coucher. Regardez Mick, le pauvre ! Il tombe de sommeil ! Je suis persuadée que vous allez tous faire de beaux rêves après la merveilleuse aventure que vous venez de vivre. »

Elle accompagna les filles dans leur chambre.

« Dis-moi, Claude, n’est-ce pas Dagobert que j’aperçois là, sous ton lit ?

— Oui, maman, c’est lui ! répondit Claude en faisant mine d’être surprise. Dis-moi, Dag, pourquoi t’es-tu glissé là ? »

Dagobert rampa hors de sa cachette et alla droit à tante Cécile. Alors, se couchant à ses pieds, il leva vers elle un regard implorant qui exprimait une muette prière. Mme Dorsel se mit à rire.

« Tu veux coucher dans la chambre des filles cette nuit, je parie ? dit-elle. Allons, accordé… pour une fois !

— Maman ! cria Claude, folle de joie. Oh ! merci ! Mille fois merci ! Comment as-tu deviné que je mourais d’envie de ne pas me séparer de Dagobert ce soir ? Dagobert, tu peux coucher sur la descente de lit, tout près de moi ! »

Ce furent quatre enfants heureux, qui se mirent au lit ce soir-là. Leur passionnante aventure avait eu un heureux dénouement. Une longue période de vacances s’ouvrait encore devant eux… et l’oncle Henri, tout souriant, ne leur faisait plus du tout peur !… L’île et le château de Kernach continuaient à être la propriété de Claude ! Bref, on ne pouvait rien souhaiter de plus !

« Si tu savais comme je suis contente que l’île ne soit pas vendue ! soupira Annie sur le point de s’endormir. Je suis heureuse à la pensée qu’elle t’appartient toujours.

— Elle appartient aussi à trois autres personnes, répondit Claude. Car elle est non seulement à moi mais encore à toi, à François et à Mick. J’ai découvert qu’il était fort agréable de partager ce que l’on possède. Dès demain, je vous donnerai solennellement un quart de mon île à chacun.

— Oh ! Claude… c’est magnifique ! murmura Annie, enchantée. Comme les garçons vont être contents ! Je suis moi-même si…»

La petite fille n’eut pas le temps d’achever sa phrase : elle venait de s’endormir. Claude ne tarda pas à suivre son exemple… Dans leur chambre, les garçons dormaient aussi, rêvant aux lingots, aux oubliettes, et à mille autres choses passionnantes.

Seul Dagobert était encore éveillé. Oreilles dressées, il écoutait la respiration de Claude et d’Annie. Dès qu’il comprit qu’elles étaient profondément endormies, il quitta sa descente de lit et s’approcha avec mille précautions de la couchette de Claude… Posant les pattes de devant sur le bord du lit, il flaira la fillette endormie.

Puis, d’un bond, il sauta sur les couvertures et se coucha en rond contre ses jambes. Alors, avec un soupir d’extase, il ferma les yeux. Sans doute les enfants étaient-ils très heureux… mais Dagobert était plus heureux encore !

« Oh ! Dag ! soupira Claude qui s’était à moitié réveillée en sentant le chien auprès d’elle. Dag ! Il ne faut pas ! Enfin… tu es si gentil ! Écoute, mon vieux Dagobert,… nous vivrons encore de palpitantes aventures tous les cinq,… tu verras. »

Oui, le Club des Cinq devait connaître d’autres palpitantes aventures… Mais cela est une autre histoire !

 

 

FIN

Club des Cinq 01 Le Club des Cinq et le trésor de l'île
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